« Un avatar low cost : la 3D avec la dimension du coeur. »
par silenceonmange
Mammuth, Benoît Delépine et Gustave Kervern (2010)
Ingrédients :
Une grosse marmite pleine d’acteurs français comme on les aime
Une toute petite bolinette de mélancolie
Une cuillère à soupe d’humour (de préférence d’origine grolandaise)
Ce n’est pas en tant que journaliste ou bloggeuse (on n’en est pas encore là…) mais tout simplement en tant qu’abonnée à la carte de fidélité UGC que j’ai eu le plaisir d’assister à l’avant-première de Mammuth, le dernier film du duo grolandais Benoît Delépine-Gustave Kervern, en présence des deux réalisateurs. Enfin, présence c’est beaucoup dire, ce fut plutôt un passage en coup de vent. Bien que bref, le passage de Benoît Delépine et Gustave Kervern n’en fut pas mois marquant. Comme à chacune de leurs interventions pour la promo du film, du moins celles que j’ai pu voir ou lire, les grolandais remercient et rendent hommage à Depardieu, qui, comme la moto Mammuth du film, est “cet objet massif, fait à la main, qui nous arrive des années 70”. Effectivement, il est massif le Dépardieu, présence imposante, presque éléphantesque oserai-je dire. On le redécouvre dans une simplicité et une générosité que ses derniers rôles avaient pu nous faire oublier, parfois.
Mammuth, comme souvent les films du duo Delépine-Kervern, est un film qui a beaucoup de coeur, un film simple voire pauvre mais seulement dans les moyens. Comme cette cuisine populaire que l’on retrouve en tout lieu et en tout temps et qui avec les moyens des bords, ramassés à droite à gauche, cherche à nourrir le plus possible. Nourriture du corps ou nourriture de l’esprit ? Mammuth est un régal des yeux avant tout. L’image est très saturée, sur ou sous-exposée, un peu “sale” à cause du grain de la pellicule mais les couleurs en ressortent d’autant plus, comme sur une palette. Les bleus surtout très présents, le ciel, la mer, les yeux de plusieurs acteurs. Le rouge de la Mammuth, cette moto improbable chevauchée par Gérard Depardieu.
Depardieu, il fallait le voir face à machin Olivier Galzi, le présentateur-remplaçant du JT de France 2, refusant coûte que coûte de le laisser simplifier et banaliser un film qui ne l’est pas. Désenchanté ? Si peu. Triste ? Que nenni. Certes, l’easy rider a vieilli, a pris sa retraite. Le voyage n’est plus sa propre finalité, un but purement matériel l’a imposé. Gérard incarne un personnage plus tranquille et bien moins fougueux que Dennis Hopper en son temps. Mais n’oublions pas la fin d’Easy rider. Les deux motards des années 70 n’ont pas droit au happy end d’un Mammuth retrouvant sa Yolande Moreau, plus savoureuse que jamais. Alors que Dennis Hopper et Peter Fonda entretenait un rapport mortifère à leurs engins, Depardieu sait ici s’en séparer, le moment venu. C’est la vie qui l’emporte. De plus, la précarité des personnages est nappée d’une bonne dose d’humour salvatrice. Le film privilégie le rire au larmes, sans pour autant laisser aucun des deux dans l’assiette.
Derrière les cuisines du film, on devine une grande famille, certains acteurs sont d’anciens compagnons de routes, d’autres participent bénévolement pour apporter leur savoir-faire à cette grande tambouille. Merci pour le saucisson, Gérard.
Suggestion du chef : Un plat bien français s’impose ici, un plat traditionnellement cuisiné avec les restes du pot-au-feu de la veille… Oui, un bon hachis parmentier se mariera à merveille avec le film, à condition de ne pas utiliser de viande de Mammouth.
il paraît qu’il y a aussi une jeune actrice autiste très douée dans ce film (lu dans « libé »…); effectivement, un long métrage qui a l’air d’être plein de vie, de coeur …et de personnalité. ta critique finit de m’en convaincre !
Je ne savais pas qu’elle était autiste mais maintenant que tu le dis c’est très probable qu’elle le soit. En tout cas son rôle est très intéressant, c’est sûr.
C’est ici une grande fan de Groland qui vous parle: j’espérais trouver dans ta critique la réponse à ce qui est un grand mystère pour moi, à savoir pourquoi la critique d’un film aussi mauvais pouvait porter un titre aussi joli… Ce qui s’amène avec ses gros sabots, je trouve, c’est le film tout entier. Puisque vous parlez du personnage de l’autiste, est-ce que ce ne sont pas les scènes les plus vulgaires, lourdes et limite obscènes que vous ayez jamais vues???? Tout ça pour voir Depardieu ouvrir grand ses bras à la vie.
Ca reste un mystère pour moi.
Ah bah non j’ai vraiment trouvé ça très touchant au contraire… ce qui m’a le plus gêné c’est la présence d’Adjani que j’ai trouvée pesante et un peu inutile, ça oui.
Mais leurs films sont très particuliers et j’ai toujours un peu de mal à expliquer pourquoi j’aime.
En tant que fan de Groland tu aimeras p’te plus le film de Francis Kuntz « Henry » (signé sous le pseudonyme Kafka) où on retrouve tout son humour noir et sa méchanceté.
Tu as vu d’autres de leurs films? Moi j’avais vu Avida, c’est pour ça que je n’ai pas voulu voir Louise Michel ensuite (j’ai détesté). Là je me suis laissée tenter uniquement en entendant plein de bruit autour… J’ai vérifié et Henry ne jouait plus que dans un ciné à Paris la semaine dernière alors cette semaine ça doit être 0!
Ah bah moi j’ai aimé tous les autres aussi. Celui-là est dans la lignée en effet, bien que moins radical que Avida.
C’est dommage que Henri soit passé aussi inaperçu, c’était pas un chef d’oeuvre mais il avait pleins de bonnes qualités et j’adore l’humour Francis Kuntz. Tu pourras p’te le voir en DVD!